Le Business model innovant d’Airvy

La plupart des plateformes collaboratives ont le même business model (quand elles en ont un) : le financement par la commission sur chaque transaction. Cependant ce type de financement a des limites, notamment le fait qu’il augmente le prix de la transaction, et ce souvent pour les deux parties… Airvy, un nouveau site de location de camping-car entre particuliers propose de se démarquer avec un business model particulièrement original : l’abonnement annuel ! Explications grâce à cette interview de Fabrice Dedeye, fondateur d’Airvy.

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Peux-tu te présenter rapidement et expliquer ce qui t’a poussé vers la location de camping car entre particuliers ?

C’est suite à un voyage sur le continent américain que j’ ai découvert l’économie collaborative en expérimentant l’échange de maisons pendant 6 mois consécutifs sans revenir chez moi, via le site Home Exchange. Ensuite j’ai tout naturellement renouvelé l’expérience avec la location de voitures, location de chambres entre particuliers…

Avec mon ami Camille, camping-cariste de toujours et programmeur expérimenté, c’est lors d’un diner que l’on a découvert notre passion commune. Comme je cherchais à m’impliquer dans l’économie du partage, on a donc tout naturellement décidé d’associer nos passions autour d’un projet orienté « collaboratif » qui associe la convivialité, le partage et l’éco-responsabilité.

Le projet a ensuite très vite vu le jour et après des heures de brainstorming le nom Airvy est apparu comme évident : simple, court, pertinent et surtout en référence à « RV » : la consonance américaine de Recreational Vehicle, à savoir camping-car avec en plus un clin d’oeil à l’univers collaboratif dans lequel on évolue.

A mi-chemin entre le logement et la voiture, le camping-car se présente comme un genre hybride, une maison sur roues, mais conscients que les vacances en camping car restent onéreuses pour un bon nombre d’entre nous, nous avons choisi de bousculer les règles et de proposer un mode de fonctionnement sans commission afin de rendre les tarifs le plus attractif possible et ainsi démocratiser les vacances en camping car!

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Le Business Model d’Airvy est très innovant, peux-tu l’expliquer rapidement à ceux qui ne le comprendraient pas ?

Notre philosophie : démocratiser les vacances en camping-car.

Aussi, pour rendre les tarifs de location le plus attractif possible nous avons décidé de ne pas rajouter de commission sur les prix pratiqués par les propriétaires car les 15% additionnels renchérissent substantiellement le coût des locations.

Les locataires paient le juste prix qui est entièrement acquis au propriétaire qui ainsi n’est ainsi pas lésé. De plus, des tarifs compétitifs et pertinents permettent d’optimiser son calendrier de réservation et donc de louer plus.

Pour le propriétaire, l’adhésion annuelle de 99 euros est très souvent rentabilisée dès la première location et lui permet de faire autant de locations qu’il le souhaite sur une année.

Contrairement à la rémunération à la commission, c’est un Business Model où la création d’une vaste communauté semble plus compliquée, quels sont tes plans pour faire grandir la communauté ?

C’est une question très pertinente et tu m’excuseras de ne pas pouvoir te donner de réponse immédiate pour des raisons stratégiques. Je t’invite à suivre l’évolution d’airvy dans les semaines qui viennent pour en savoir plus.

Penses-tu que c’est un Business Model qui pourrait s’adapter à d’autres plateformes (ex: le covoiturage, le jobbing …) ?

Par expérience, après la première phase de mise en place, le passage au marché de masse entraîne nécessairement des modifications de l’offre initiale sous l’effet de la demande des utilisateurs et de la pression concurrentielle. Les acteurs adapteront leur business model en conséquence afin de rester compétitif. Tous les secteurs de l’économie collaborative pourront être concernés, surtout ceux qui arrivent aujourd’hui à maturité.

Quel avenir vois-tu à l’économie collaborative ? (notamment étant donnés les freins légaux dont on parle beaucoup aujourd’hui).

Une tendance lourde que rien ne peut à mon sens arrêter.

Le fameux amendement « Drivy » du député UDI Charles Amédée de Courson (ou la réglementation sur les VTC et les 15 mn de délai) présenté en fin d’année dernière et heureusement rejeté, illustre le combat que mène certains lobbies qui s’accrochent à des acquis surannés et qui veulent avec l’aide des pouvoirs publics, freiner l’essor de l’économie de partage pour protéger des monopoles existants.

Il est vrai qu’il y a de fait un risque réglementaire car comme tout nouveau marché, il peut y avoir des débordements et il est nécessaire de poser certaines règles pour éviter les abus d’une minorité préjudiciable à la grande majorité.

Les professionnels n’ont pas tout à fait tort lorsqu’ils évoquent parfois une concurrence déloyale mais à l’inverse, l’on ne peut pas vouloirprotéger à tout prix des monopoles ou des rentes de situations et compromettre ainsi le développement de toute une économie, génératrice d’emplois, et promise à un très bel avenir.

De plus, comment remettre en cause un modèle qui permet à n’importe qui disposant d’une connexion internet de faire connaitre son savoir faire au monde entier, de créer du lien social, de faciliter la protection de l’environnement en permettant à la réutilisation ou le partage et d’accroitre le pouvoir d’achat.

Nous, nous considérons que chacun doit prendre ses responsabilités. Les particuliers qui doivent respecter la législation et remplir leurs obligations fiscales et réglementaires mais aussi les professionnels qui au lieu de voir l’économie collaborative comme une menace doivent chercher à en tirer des enseignements leur permettant d’enrichir leur offre et d’être plus compétitifs car ils auront toujours des atouts à faire valoir.

Les nouvelles technologies et l’accès permanent et instantané à internet ont permis l’émergence de solutions très innovantes qui facilitent le quotidien et nous sont aujourd’hui devenues indispensables (on pensera par exemple leboncoin quand un français sur deux reconnait avoir acheté au moins un produit d’occasion) et dont on ne peut plus se passer. Tous les secteurs sont concernés, des chambres entre particuliers aux taxis, en passant par l’automobile et le camping car ou encore le covoiturage, et le costockage, les coopératives… sans parler de l’économie de la connaissance. Je ne peux bien sur par tout citer sans devenir vite lassant.

De plus les conditions économiques actuelles sont très favorables à l’essor de l’économie collaborative car elle apporte des gains de pouvoir d’achat. Elle permet de rentabiliser des biens dont la possession est coûteuse et en éliminant les intermédiaires offre des tarifs extrêmement compétitifs aux consommateurs à la recherche de bons plans. Elle permet aussi de bénéficier de prix plus attractifs en achetant directement aux producteurs ou encore d’acheter des produits d’occasion que l’on n’aurait pas pu s’offrir neufs…

Enfin, les usages de consommation tendent à se modifier sous les effets conjugués de la crise et de la conscience environnementale croissante. La nouvelle génération imprégnée des nouvelles technologies et des réseaux sociaux à une relation à la propriété très différente. Elle est davantage dans l’usage et l’échange que dans la possession. Elle recherche aussi un rapport de convivialité qu’elle trouve davantage dans l’économie collaborative.

L’économie du partage, qui n’en est qu’à ses débuts, est l’avenir et on peut conclure en lui prédisant un très beau succès. Il suffit de voir les récentes levées de fonds pour comprendre que les investisseurs eux aussi y croient ! Un signe qui ne trompe pas.

Axel Peigné

Auteur: Axel Peigné

Passionné des nouvelles technologies et impressionné par l'essor de l'économie du partage, j'ai co-fondé ce blog avec Marie-Liesse afin de partager mes connaissances et mes réflexions sur la consommation collaborative.

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4 Commentaires

  1. Il semblerait que le terme approprié pour ce type de modèle économique dans le secteur de la Conso Collab soit « à la marge » et non « innovant ».

    Le fonctionnement par abonnement existe déjà, et il ne propose pas d’innovation en terme de gouvernance non plus (ce qui est de plus en plus souvent remis en question également et au delà du pur modèle économique).

    Ceci étant: c’est un modèle économique audacieux que je ne peux que saluer 🙂

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    • YouMakeMeShare

      Merci pour votre commentaire 🙂

      Effectivement c’est un modèle qui existe déjà mais qui est innovant dans l’économie collaborative. Très peu de plateformes collaboratives fonctionnent actuellement avec ce type de business model, c’est dans ce sens qu’il faut voir l’innovation (et l’audace également !).

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  2. Très belle initiative en effet. Félicitations. Par contre a quelles levées de fond faites vous référence en terme de Conso collab mis a part blablacar ?

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    • YouMakeMeShare

      De nombreuses levées de fonds ont eu lieu ces derniers mois, par exemple celle d’Airbnb, Uber ou encore en France celle de OuiCar.
      Je pense que Fabrice faisait notamment référence à ces différentes levées de fonds dans le secteur de l’économie collaborative 🙂

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